Qu'est-ce que le bonheur et comment devenir heureux ?
La dopamine donne le coup de fouet
La dopamine est un neurotransmetteur qui active le système de récompense dans le cerveau, anticipe la joie et fait frissonner de plaisir. Elle n’apporte qu’un bonheur fugace – qu’on cherche à reproduire quand l’effet s’estompe. Car la dopamine nous fait vouloir plus, elle éveille la motivation et le désir. Les jeux vidéo sont par exemple conçus de sorte à générer en permanence un bref plaisir à travers des récompenses faisant intervenir la dopamine. La dopamine est transformée en noradrénaline dans le cerveau, un neuromédiateur qui joue un rôle important dans l’attention et la performance. Les personnes âgées produisent en général moins de dopamine que les plus jeunes, ce qui explique en partie qu’elles ressentent le bonheur différemment.
La dopamine a son revers: la quête insatiable de plaisir immédiat peut se faire parfois au prix de conduites à risque. Les drogues ou le jeu peuvent dérégler le système et mener à l’addiction. D’où la difficulté de s’en désaccoutumer.
La sérotonine pour l'équilibre calme et satisfait
Autre hormone du bonheur, la sérotonine joue un rôle majeur dans la détente, elle a un effet antagoniste à celui de la dopamine. Elle procure un sentiment d’harmonie et de contentement, comme après un bon repas où l’on se dit que l’on pourra attendre le lendemain pour refaire le monde. La sérotonine fait en quelque sorte rester tranquille. C’est par cette image que le cabarettiste et médecin Eckart von Hirschhausen décrit l’effet de la sérotonine dans son livre «Glück kommt selten allein» (Le bonheur - la chance n’arrive jamais par hasard). De nombreux antidépresseurs renforcent les effets de la sérotonine. Pour la synthétiser, les cellules nerveuses ont besoin d’un acide aminé: le tryptophane.
Les endorphines provoquent le « runner's high »
Les endorphines sont chimiquement apparentées à l’opium. Elles provoquent une exaltation née d’un sentiment d’accomplissement. Lors du sport, le corps produit naturellement des endorphines, qui ont la propriété de réduire la sensation de douleur par leur action antalgique. L’état d’euphorie explique en partie le besoin que ressent l’athlète de faire son sport. L’ivresse du coureur ne serait donc rien moins que le résultat direct des endorphines produites par le cerveau.
L'ocytocine - l'hormone de l'attachement
Hormone de l’attachement, l’oxytocine est un neurotransmetteur qui favorise la confiance envers les autres et la chaleur interpersonnelle. C’est elle aussi qui participe au profond attachement qui se développe dans une relation amoureuse. Lorsque vous faites une bonne affaire ou que vous écoutez une musique qui vous donne la chair de poule, la production d’oxytocine augmente. Il en est de même lors des rapports sexuels et de l’allaitement. Le bonheur maternel est donc aussi un bonheur d’ocytocine.
L'anandamide détend
Son nom est tout un programme. Car en sanskrit «Anandam» signifie «béatitude». Cette hormone fait partie des cannabinoïdes endogènes qui sont chimiquement apparentés au cannabis. Ce sont des substances qui procurent un effet relaxant et protègent les cellules cérébrales contre les agressions. Au fait le chocolat noir contient des substances pouvant activer les récepteurs cannabinoïdes situés dans le cerveau. Reste encore à préciser leur effet à si petites concentrations.
Peut-on influencer le bonheur ?
Dans les pays occidentaux, le sentiment général de bonheur dépend à 50% environ du niveau de base génétiquement déterminé ou est acquis très tôt dans la vie. L’on est l’artisan de son propre bonheur dans une proportion de 40% environ. Les circonstances extérieures momentanées agissent quant à elles sur environ 10% du sentiment de bonheur, précise Sonja Lyubomirsky, une professeure américaine spécialisée dans l’étude du bonheur. Sa théorie pourrait expliquer par exemple l’impression de bonheur à court terme des gagnants au loto. Il est réconfortant de savoir que la part innée du bonheur, quoique très élevée, ne conditionne pas le reste de notre existence. Car on peut devenir heureux sans avoir eu une enfance heureuse.
Conseils pour être plus heureux
On est souvent heureux quand on a une vie plaisante, engagée ou qui a du sens. Et si l’on combinait les trois?
Conseil n° 1: Faire du bien aux autres (et par conséquent à soi-même)
«De nombreuses études montrent que les personnes qui utilisent leurs forces de caractère et des caractéristiques moralement valorisées d‘une nouvelle manière que celle dont ils ont l‘habitude augmentent leur niveau de bonheur», explique René Proyer, professeur de psychologie et chercheur spécialiste de la question du bonheur de l’université Martin-Luther de Halle-Wittenberg. Il conseille de commencer par identifier ses propres forces. Au moyen par exemple du questionnaire disponible gratuitement sur www.charakterstaerken.org. Puis de les mobiliser différemment. Vous vous faites ainsi du bien à vous-même et aux autres. Les deux rendent heureux. «Vous augmentez de la sorte les expériences émotionnelles positives, qui peuvent se vivre comme des petits moments de bonheur. On se crée ainsi au fur et à mesure de nouvelles sources d’énergie et de joie», précise René Proyer.
Conseil n° 2: Exprimer sa gratitude
Certaines personnes vous ont donné un bon conseil au bon moment. Ou vous ont soutenu quand vous en aviez besoin. Elles ont joué un rôle extrêmement important dans votre vie – sans le savoir. Il est temps de les remercier par une lettre! C’est l’occasion de se remémorer la situation, d’y porter un nouveau regard, de se rappeler qu’il est possible de surmonter les situations difficiles. «La lettre de gratitude est généralement génératrice d’un grand soulagement, d’un sentiment de bienêtre très positif pour celui ou celle qui l’écrit», dit René Proyer. Une fois la lettre rédigée, trois possibilités: on la garde pour soi; ou on l’envoie à son destinataire, en se promettant peut-être de le contacter plus tard personnellement. «La troisième possibilité est celle qui demande le plus de courage, et probablement la plus émouvante: remettre la lettre en mains propres et la lire à haute voix», dit René Proyer. On raisonne trop souvent «en problèmes». Au lieu de ruminer ce qui ne fonctionne pas et qu’on peut améliorer, l’exercice de la gratitude rend les aspects positifs de la vie plus saillants.
Conseil n° 3: Tenir un journal des plus beaux événements
Prendre cinq minutes chaque soir pendant une semaine pour repenser aux trois meilleures choses de la journée, les trois plus amusantes ou les plus espiègles, rend plus heureux. Selon René Proyer, cette pratique a un effet sur le bien-être jusqu’à six mois plus tard. «Le mieux est de le faire régulièrement», indique le psychologue. En déplaçant l’attention vers les souvenirs positifs, on peut se construire avec le temps un «journal des changements positifs».
Conseil n° 4: Faire du sport
Des études montrent que le sport peut être tout aussi utile contre la dépression qu’une psychothérapie ou des antidépresseurs. Pourquoi ne pas mettre à profit ses vertus pour stimuler l’humeur au quotidien? Le sport procure des sentiments de réussite et de succès, réduit le niveau de stress, renforce l’estime de soi, augmente l’endurance, favorise l’esprit d’équipe et le bien vivre ensemble. Ce n’est pas tout. L’entraînement est bénéfique pour le corps et l’esprit – depuis l’appareil locomoteur jusqu’aux facultés intellectuelles. Il réduit le risque de divers cancers, améliore le sommeil, prévient la survenue d’un diabète et d’un infarctus, abaisse la tension artérielle et le cholestérol – et rend la vie plus heureuse. L’idéal est de programmer au moins trois séances d’entraînement de 30 minutes par semaine, à une intensité modérée – autrement dit on doit être capable de parler pendant l’effort, mais pas de chanter sans être essoufflé.